Pourparlers de Doha : « Entre dogme et réalité, le leadership, c’est l’équilibre »[Ambassadeur Thierry Monsenepwo]

Il est facile de se scandaliser derrière un écran. Plus difficile de comprendre la lourde responsabilité de la paix quand on est à la tête d’une nation. Certains accusent aujourd’hui le Président Tshisekedi d’incohérence parce qu’une délégation congolaise participe à des discussions avec le M23 à Doha. Pourtant, sa position demeure ferme, son cap reste inchangé, et les principes qu’il défend sont plus vivants que jamais.

Voici pourquoi :

Clarifier : Il n’y a pas de contradiction, mais une distinction entre principes et méthodes
Dire qu’on ne légitimera pas un groupe terroriste, ce n’est pas refuser toute tentative d’éviter la guerre. Ce que le Chef de l’État a exclu – et continue d’exclure – c’est la reconnaissance politique du bloc M23-AFC-RDF-KIGALI comme acteur institutionnel. À Doha, la RDC ne négocie pas un accord de partage de pouvoir, mais participe à un processus de désescalade régionale piloté par des partenaires internationaux.
Exemple mondial :
En 2016, le gouvernement colombien a signé un accord de paix avec les FARC, une guérilla responsable de dizaines de milliers de morts. Ce n’était pas une récompense, mais une stratégie de fin de conflit, encadrée et contrôlée. Résultat ? Une baisse drastique des violences, sans effacer la mémoire des victimes.

La RDC suit la même logique : la paix n’est pas une faiblesse, c’est un devoir.

Rappeler : La parole présidentielle est respectée dans son esprit Quand le Président Tshisekedi a dit « aucune légitimation du M23 », il l’a dit en pensant aux morts de Kishishe, aux femmes violées, aux enfants arrachés à leur village. Et cette mémoire, il la défend toujours. Ce qui se discute aujourd’hui, ce sont les conditions d’un désarmement, d’un retrait, et d’une réinsertion régionale contrôlée. Pas une forme de pardon déguisé. Encore que cela reste dans la ligne droite de ce que le chef de l’état avait initié pour tous les groupes armés de l’Est dont le m23 dans sa version d’avant la collusion avec Kigali, le processus de Nairobi que ces derniers avaient quittés pour épouser Paul Kagame.
Exemple mondial :
Aux Philippines, en 2014, le gouvernement a entamé des pourparlers avec le MILF (Front Moro islamique de libération), responsable d’une rébellion armée ayant fait des milliers de morts. L’objectif n’était pas l’oubli, mais la fin des hostilités. Un cadre politique a été créé, tout en maintenant la justice pour les crimes commis. La RDC, elle, refuse toute intégration politique ou militaire du M23. C’est un signal clair : aucune impunité.

Réorienter : Refuser le piège du populisme émotionnel
Il est tentant de vouloir la guerre totale. Mais qui va en payer le prix ? Pas ceux qui tweetent. Pas ceux qui accusent sans agir. Ce sont nos soldats, nos civils, nos territoires. Un Chef d’État digne n’agit pas en fonction des hashtags. Il agit pour sauver des vies, préserver l’intégrité du pays, et garantir une victoire durable.
Exemple mondial :
En 2007, le Premier ministre britannique Tony Blair a reconnu la nécessité de dialoguer indirectement avec l’IRA (Armée républicaine irlandaise), autrefois considérée comme organisation terroriste. Cela a conduit à l’Accord du Vendredi saint, un des plus grands succès diplomatiques de l’époque moderne. La paix en Irlande du Nord tient encore aujourd’hui, parce qu’un dirigeant a osé choisir la stratégie sur l’émotion.

De la même manière, Félix Tshisekedi refuse de faire plaisir à la foule pour échouer dans l’histoire. Il avance avec lucidité, car la paix, ce n’est pas un slogan, c’est une construction.

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