« Non à l’hypocrisie diplomatique : Pourquoi le Président Félix Tshisekedi ne doit pas assister à la Conférence de Paris sur la Paix dans les Grands Lacs »[Éric Kamba]

Le 30 octobre 2025, la France organise à Paris, en partenariat avec le Togo, une « Conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs ». Officiellement, cette rencontre vise à « répondre à l’urgence humanitaire dans l’est de la RDC » et à « soutenir les processus de paix et de médiation en cours ».
Mais derrière cette façade de bonne volonté se cache une immense hypocrisie diplomatique. La France, qui se prétend amie du Congo et promotrice de la paix, fait en réalité partie du problème, pas de la solution.

  1. Une mascarade diplomatique pour blanchir la duplicité française

Cette conférence n’est rien d’autre qu’une opération de communication destinée à redorer l’image d’une diplomatie française en perte de crédibilité dans la région.
Depuis plus de vingt ans, la France n’a jamais condamné clairement les crimes commis au Congo par le Rwanda, ni son soutien militaire, logistique et politique au mouvement terroriste M23, responsable de massacres, de viols de masse et du pillage systématique des ressources congolaises.

Comment peut-on prétendre défendre la paix tout en couvrant les agresseurs ?
Comment peut-on parler d’« aide humanitaire » quand les véritables causes de la souffrance — l’agression rwandaise et la complicité internationale — sont tues ?

  1. La France et l’Union européenne : complices du pillage des minerais congolais

Sous couvert de coopération économique, l’Union européenne — avec l’appui actif de Paris — a signé des accords stratégiques avec le Rwanda pour l’importation de minerais dits « critiques » (coltan, cobalt, lithium, tantale).
Or, le Rwanda ne possède pratiquement pas de gisements de ces minerais : il les obtient en les faisant piller illégalement à l’est du Congo, dans des zones contrôlées par le M23 et d’autres milices soutenues par Kigali.

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Autrement dit, la France et l’Europe profitent de la guerre, transforment le Rwanda en recelleur de minerais de sang, et contribuent indirectement à l’effusion de sang congolais.
Dans ce contexte, participer à une conférence organisée par Paris reviendrait à valider une imposture morale et à cautionner le pillage international du Congo.

  1. La Francophonie : un instrument dévoyé au service du Rwanda

L’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) s’est tristement tue devant les crimes commis au Congo.
Depuis que la France a soutenu la candidature du Rwanda — un pays anglophone dans les faits — à la Francophonie, et placé une ancienne ministre rwandaise à sa tête, l’organisation est devenue un outil d’influence politique au service de Kigali.

Ce choix n’était pas neutre. Il symbolisait la préférence de Paris pour un régime docile, utile et économiquement rentable, plutôt que pour une RDC francophone, riche et stratégiquement indépendante.
La Francophonie, jadis symbole de solidarité et de culture partagée, est devenue un instrument de manipulation diplomatique, indifférente aux souffrances des Congolais.

  1. Emmanuel Macron : le refus de la vérité et le choix du cynisme

Lors de ses rencontres avec Félix Tshisekedi, le président Emmanuel Macron n’a jamais eu le courage de nommer le Rwanda comme agresseur.
Son discours d’« équidistance » entre Kigali et Kinshasa est une forme de lâcheté diplomatique : il met sur le même pied la victime et le bourreau.

Pendant que les villes de Rutshuru, Masisi et Bunagana tombent sous la coupe du M23, pendant que des millions de déplacés errent dans les camps, la France appelle à une « solution régionale » — sans jamais exiger de Paul Kagame le retrait immédiat de ses troupes du territoire congolais.

Cette position ambiguë fait de Macron un allié objectif du Rwanda, et donc un acteur du prolongement de la guerre au Congo.

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Le Président Tshisekedi doit refuser de participer à cette mise en scène diplomatique.
Assister à Paris, c’est se prêter à une humiliation politique, c’est valider une paix de façade, c’est laisser le Congo être jugé par ceux qui le pillent.

La RDC doit poser des conditions claires à tout dialogue

Retrait immédiat des troupes rwandaises et du M23 du territoire congolais.
Reconnaissance par la France du génocide congolais documenté par le Rapport Mapping des Nations Unies.
Condamnation officielle du Rwanda pour son rôle dans l’agression contre la RDC.
Mise en place d’un mécanisme international de justice et de réparation pour les millions de victimes congolaises.
Tant que ces conditions ne seront pas réunies, aucune conférence sur la paix n’aura de sens.
Participer à celle de Paris, ce serait nier la vérité et trahir la mémoire des victimes.

  1. La reconnaissance du génocide congolais : une exigence de justice et de mémoire

Il ne peut y avoir de paix durable sans reconnaissance de la vérité historique.
Entre 1996 et aujourd’hui, plus de six millions de Congolais ont péri dans des violences orchestrées par des groupes armés soutenus par le Rwanda et ses alliés. Ces crimes, documentés par le Rapport Mapping de l’ONU (2010), présentent tous les éléments constitutifs d’un génocide.

La France, qui a reconnu sa responsabilité dans le génocide rwandais de 1994, ne peut continuer à ignorer celui qui se déroule au Congo depuis près de trois décennies.
Reconnaître le génocide congolais, c’est reconnaître la valeur de la vie africaine, c’est admettre que les victimes congolaises méritent la même justice, la même compassion et la même mémoire que celles du Rwanda.

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Tant que la France refusera de reconnaître ce génocide, son discours sur les droits humains, la paix et la justice restera hypocrite et sélectif.
La reconnaissance du génocide congolais doit être la condition première de tout dialogue politique sincère entre Kinshasa et Paris.

  1. Pour une diplomatie congolaise de vérité et de dignité

La RDC doit désormais construire une diplomatie de vérité, libérée de la tutelle morale et symbolique de l’ancienne puissance coloniale.
Elle doit s’appuyer sur des partenaires sincères — ceux qui, comme les États-Unis récemment, choisissent le dialogue direct avec Kinshasa et reconnaissent la RDC comme acteur souverain, et non comme un simple fournisseur de minerais.

La vraie paix dans les Grands Lacs ne viendra pas de Paris, ni de la Francophonie, mais de la vérité, de la justice et du respect mutuel entre nations africaines.

Conclusion : la dignité n’est pas négociable

Le Congo ne doit pas aller mendier une paix truquée dans les salons parisiens.
Il doit défendre sa dignité, sa souveraineté et la mémoire de ses martyrs.
Tant que la France ne dénoncera pas clairement les crimes du Rwanda et ne reconnaîtra pas ses propres complicités, elle restera disqualifiée moralement pour parler de paix au Congo.

Le Président Tshisekedi doit dire non.
Non à l’hypocrisie. Non à la manipulation. Non à la trahison diplomatique.
Le Congo mérite mieux qu’une conférence de façade : il mérite justice, respect et vérité.

Éric Kamba, Géostratège et analyste des questions africaines

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